Des légumes de saison bios venus d’une ferme, du poisson d’une pêcherie
locale. Rien que de bons ingrédients pour le «Star chef» de Kinshasa.-AFP
«Star
chef» en Afrique l’année dernière, Christian Yumbi qui tient un
restaurant à Kinshasa a fait ses débuts de chef en Belgique.
Révélé en Belgique après des
années difficiles en Europe, c’est chez lui, en République démocratique du
Congo, que s’épanouit désormais Christian Yumbi, sacré «Star chef» 2014 par un
concours télévisé panafricain, et promoteur d’une cuisine «congolaise moderne».
«Ce qui importe le plus pour
moi, c’est le plaisir de mes clients, lorsqu’ils dégustent par exemple un plat
de légumes à sucer, à croquer ou à boire», explique
M. Yumbi, en travaillant debout dans la cuisine ouverte sur la piscine et le
petit jardin de son restaurant «Re-Source» à Kinshasa.
Dans un pays où la grande
majorité de la population peine à manger à sa faim, le choix des aliments est
bien souvent peu varié et d’abord dicté en fonction de leur vertu roborative. À
l’inverse, M. Yumbi innove à partir des produits locaux avec des créations
légères.
Né en 1976 et titulaire d’un
master de l’École Ritz Escoffier de Paris, le chef a fait ses premiers pas en
cuisine en Belgique. Étudiant à Bruxelles, «je nettoyais les assiettes pour
financer mes études», raconte celui qui rêvait alors de devenir
fonctionnaire.
Un resto en Belgique
M. Yumbi affirme avoir tenté
sans succès de se faire une place dans de grands restaurants belges. «J’avais
atteint un bon niveau, dit-il, mais il m’était presque impossible de
devenir chef parce que j’étais noir et africain. […] Déstabilisé, frustré,
froissé, j’avais du mal à survivre.»
En 2004, il obtient un crédit
de 19 000 euros et ouvre son premier restaurant en Belgique, fidèle à l’esprit
du «Slow food», mouvement international créé en réaction à l’expansion de la
restauration rapide et à l’uniformisation du goût: «C’était un peu le retour
à la source, d’où le nom de mon restaurant Re-Source.»
En 2006 vient la
reconnaissance par le guide gastronomique français Gault & Millau. Mais en
2008, la conjonction de la crise financière et d’un racisme latent qu’il ne
supporte plus le décide à revenir au Congo.
De retour à Lubumbashi dont il
est originaire, il y implante rapidement «Re-Source». Les difficultés
d’approvisionnement dans une ville où «tout (produit alimentaire) est
importé» de la Zambie voisine, finissent par jouer en faveur d’un
déménagement vers Kinshasa.
En avril 2012, «Re-Source»
renaît dans le quartier riche de la Gombe, où la grande majorité des
restaurants reconnus est tenue par des expatriés. Loyer élevé, tracasseries
fiscales et administratives, absence de main-d’œuvre qualifiée: autant de défis
qu’il énumère mais qui ne le découragent pas.
Le chef apprécie «la qualité
des produits» que l’on peut trouver dans la capitale. Au dépôt kinois de la
ferme qui l’approvisionne en légumes de saison bio, M. Yumbi se procure des
produits de premier choix: belles tomates, grosses aubergines, concombres
«anglais» (longs)… Pour la viande, il passe par une vénérable institution de la
grande distribution congolaise, tandis qu’une pêcherie locale lui livre le
poisson à domicile.
Star chef 2014
«Avec notre cuisine congolaise
moderne, chaque produit garde son goût original», dit M.
Yumbi, tout en apprêtant des épinards.
Sélectionné par la chaîne
africaine A + (Groupe Canal +) pour représenter la RDC au concours «Star chef»
2014, il prend cela comme une chance et se donne à fond. «La préparation, le
choix des produits, la cuisson ou encore la présentation des plats, rien
n’était fait au hasard. Je devais faire les choses le plus juste possible»
pour retenir l’attention du jury, se souvient-il.
Et cela marche: il triomphe
finalement face à onze autres concurrents et gagne 10 millions de francs CFA
(15 245 euros), qu’il consacre à la rénovation de son restaurant et à la
création d’une «pépinière» destinée à former de futurs cuisiniers.
À la tête de vingt employés,
M. Yumbi se sent aujourd’hui «plus épanoui, plus libre au Congo» que
partout ailleurs
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