jeudi 30 janvier 2020

FR | Le Parisien | France | Tombouctou le McDonald africain

Le McDonald’s de demain est né à Aulnay-sous-Bois et il est africain

Gastronomie subsaharienne à prix doux, servie dans des restaurants développés en franchise : Tombouctou, le concept créé par Matiné, ancien du quartier des 3000 à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), cartonne, avec dix ouvertures en six ans.

Aulnay, le samedi 25 janvier. Matthieu, le gérant du restaurant Tombouctou, franchise de gastronomie africaine. Matiné, le fondateur, refusé d’être pris en photo.  LP/Thomas Poupeau

Par Thomas Poupeau | LeParisien.fr

« J'ai toujours aimé la discrétion, je déteste être dans la lumière, même dans les affaires. Force est de constater qu'aujourd'hui… cela me sert ! » On a beau insister : Matiné ne veut pas être pris en photo. Pas même pour parler du Tombouctou, son «bébé», un concept de fast-food design servant des plats africains, qui rencontre un énorme succès depuis sa création, il y a six ans, à Aulnay-sous-Bois. En quelques années, dix restaurants ont ouvert en région parisienne et à Troyes (Aube)*. Un onzième doit voir le jour à Paris.


La recette est simple : les spécialités de l'Afrique noire — poulet ou bœuf en sauce façon Yassa, thieb rouge ou jaune, mafé, pour les plus connus — servis sur place ou à emporter, dans de petits restaurants déclinés selon le même code couleur, et soumis à de strictes normes d'hygiène. « Le Tombouctou, c'est un peu le McDo africain », rigole une habituée des lieux. Un comparatif qui ne déplaît pas du tout à Matiné, bien au contraire.



« L'idée est simple : chaque enfant issu de la diversité a eu, un jour, envie de faire goûter les plats de son pays d'origine. Alors, avec mes frères, qui sont associés, on s'est dit : pour quoi ne pas en faire un concept moderne, propre », explique l'entrepreneur de 36 ans, originaire du quartier des 3 000. Il poursuit : « Car jusqu'ici, il n'y avait que deux manières de manger facilement africain : les restaurants un peu chers à Paris avec menu à 25 euros, ou les foyers en banlieue. Ces derniers sont très bons, mais l'hygiène, ça reste à voir. »

8 euros le plat, 11,50 euros le menu

Matiné et ses frères ont acheté un petit local et une cuisine à Aulnay, l'un d'eux, architecte de formation, a créé un logo, et ils ont mis au point leurs recettes. « On a tâtonné pour le thieb, le plat-roi, parce que c'est compliqué à commercialiser, détaille-t-il. Il faut que ce soit suffisamment relevé pour être authentique, mais pas trop pour que les palais plus sensibles y résistent. »

A la carte aussi, des spécialités moins connues, comme les épinards façon saka-saka, ou du thiou, une viande cuisinée aux légumes. En dessert, du dégué, une sorte de bouillie de mil au lait cuit. A 8 euros le plat, 11,50 euros le menu avec dessert, entrée et boisson, le ticket moyen est le même que pour un fast-food de burgers. Le nom, lui, est tout trouvé : ce sera Tombouctou, la ville du Mali d'où sont originaires les parents de Matiné.

Aulnay, ce samedi. Le thieb rouge est une franche réussite. LP/Thomas Poupeau 

Dès le début, la recette fait mouche. « On a été un peu dépassé, d'autant que la livraison fonctionnait bien », se souvient Matthieu, ex-livreur devenu gérant du restaurant d'Aulnay. « On livrait jusqu'à Sarcelles, obligés de refuser les commandes de moins de 50 euros ! »

Une cuisine centrale à Drancy

Alors, petit à petit, le Tombouctou essaime dans la région, sous le statut de franchise. Drancy en 2016, puis Nanterre (Hauts-de-Seine), Villeparisis et Meaux (Seine-et-Marne), Aubervilliers, Choisy-le-Roi (Val-de-Marne), Villemomble, Plaisir (Yvelines), et Troyes, dans l'Aube. Un projet devrait se concrétiser très prochainement à Paris, porte des Lilas.

Chaque structure affiche un chiffre d'affaires moyen de 25000 à 35 000 euros par mois et le réseau emploie une grosse cinquantaine de personnes, entre les cuisiniers, les serveurs, les gérants et les livreurs. Pour optimiser le fonctionnement des restaurants et faire des économies sur les achats en gros, ils sont désormais approvisionnés par une cuisine centrale, installée à Drancy. « Comme dans des fast-foods classiques, l'idée est d'avoir le même plat quel que soit le restaurant », précise-t-il encore.

Quid de la suite ? Alors que certaines enseignes franchisées de tacos, la tendance de ces dernières années, ont fermé aux alentours de son établissement à Aulnay, Matiné l'assure : « L'ingrédient le plus important de la réussite, c'est que les plats soient bons. Les amateurs de cuisine africaine sont intransigeants : ils mettent de l'affect dans leur cuisine parce que pour eux, le meilleur thieb, c'est celui de leur mère ! »

On a testé... et on a aimé

Fermez les yeux, vous êtes au Mali ! La cuisine servie dans les restaurants Tombouctou est sans chichi, mais elle transporte. A condition d’avoir très faim, il faut prendre une entrée, un plat et un dessert pour avoir une idée de la carte. Ticket moyen pour ce combo : 12 euros.

Objet de curiosité, les «œufs cachés », une recette sénégalaise, sont un régal : sous une couche de viande finement hachée, garnie d’herbes concassées, un œuf dur. Copieux, mais insolite. Autre entrée qui fait le job : les « pastels », beignets farcis au thon ou au bœuf, à tremper dans une sauce tomate et oignon. Sinon, à la commande, on vous propose aussi une petite purée de piments verts et rouges pour accompagner les beignets.. qui arrache subtilement.

Pour le plat, foncez sur le thieb, rouge ou jaune, l’un des plats phares d’Afrique de l’ouest. Au Tombouctou, on le sert braisé, peau craquante et chair moelleuse, goût très légèrement fumé, avec une sauce tomate, carotte et chou —pour le thieb rouge, sinon bouillon de légumes, carottes et chou pour le thieb jaune — très peu pimentée, à napper sur un riz cassé deux fois et cuit dans un bouillon d’épices. Là encore, il est possible de rehausser l’ensemble avec quelques cuillerées de piment concassé.

Enfin, pour le sucré, rien de tel qu’un jus de bissap, une boisson à base d’hibiscus, pour terminer le repas. Au Tombouctou, il est très sucré, et le très grand verre est servi pour 2 euros.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire