jeudi 16 janvier 2020

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Chef Dieuveil Malonga : changer l’histoire de la cuisine africaine

Par Ilse Lasschuijt, Inzozi Rwandair’s Inflight Magazine
Son nom fait monter le buzz à Kigali depuis un certain temps. Dieuveil Malonga, un grand chef et entrepreneur culinaire, qui fusionne ses racines africaines avec sa formation européenne pour offrir de nouvelles saveurs aux goûts sensationnels

Dieuveil Malonga (28ans) appelle sa spécialité personnelle Homeland, qu’il présente comme une assiette en couleurs et élégante, mélangeant différents ingrédients avec de la mangue préparée, de la crème d’avocats, du moringa, des crevettes et sa spéciale « Soweto-sauce », qui comprend un mélange d’arachides, de tomates et d’épices. Ce plat, dont les ingrédients peuvent varier selon l’endroit, illustre à merveille son parcours personnel de l’Afrique vers l’Europe et son retour sur le continent. « Mon style évolue encore, car j’apprends chaque jour de mes nouvelles expériences ». Dieuveil Malonga est né et a été élevé au Congo (Brazzaville), avant que des circonstances personnelles le conduisent en Allemagne à l’adolescence.
Là-bas, il commence sa formation et sa carrière culinaire. Le jeune Malonga se forge très rapidement une réputation à mesure qu’il travaille dans plusieurs restaurants étoilés au Guide Michelin, en Allemagne et en France. Il se classe même finaliste du prestigieux Prix Mondial pour la cuisine basque en 2018, et se hisse à la 6ième place de la catégorie « 30 under 30 » du célèbre magazine Forbes.

Respecter les ingrédients

Durant ses années européennes, le chef continue de rêver des senteurs et des saveurs de son enfance en Afrique. Après plusieurs années d’aller-retour, il partage aujourd’hui son temps entre Kigali et Paris où il organise de prestigieux dîners pour les gastronomes. « Faire de Kigali mon domicile en Afrique a été un choix personnel », dit-il avant de préciser que « la ville est verte, sans danger et propre, et située au centre de l’Afrique. Je suis séduit par l’ambition de ce pays ». Dieuveil Malonga s’amuse de l’effervescence qui règne dans la capitale rwandaise : « Je n’ai jamais vu autant de jeunes CEOs aussi doués ». Il passe beaucoup de temps à s’imprégner des spécificités de la ville, visitant et s’entretenant avec des agro-entrepreneurs et agriculteurs locaux. « Comme chef, je dois évidemment avoir des informations sur la nourriture et respecter les ingrédients locaux », précise-t-il. « La nourriture, c’est l’émotion, elle vient de notre sol et elle a des goûts différents partout. J’apprends encore chaque jour de nouvelles choses sur les légumes et les épices d’ici, par exemple les nombreuses variétés de haricots au Rwanda ou comment le vol volcanique a un impact sur le goût des légumes ».

La Nourriture avec une histoire

Au cours des années, Dieuveil Malonga a développé sa propre cuisine Afro-fusion, qu’on pourrait définir comme une touche moderne éclectique et radieuse de recettes traditionnelles africaines. Ses recettes comprennent le ravioli de plantains, le sorbet de prunes, des variations de recettes traditionnelles telles que le riz jollof, isombe ou achu et des desserts sucrés avec du chocolat africain, café et gingembre. Sa volonté est de placer son art culinaire sur la scène mondiale et de changer l’histoire de la cuisine africaine. « Je crois que la cuisine africaine (sub-saharienne) deviendra le nouveau courant global », s’enthousiasme-t-il.

« Ce continent a tant de choses à offrir. Les ingrédients et les saveurs racontent des histoires : les Bamileke camerounais préparent une recette collante appelée Nkui pour célébrer la naissance d’un enfant. Elle contient douze condiments différents et est servie à la mère pendant 30 jours pour lui permettre de regagner des forces ». Comme toutes les passionnés, Dieuveil Malonga aime partager une histoire sur ses propres expériences culinaires lors de ses voyages en Afrique de l’Ouest et en Afrique Centrale. Ses yeux s’illuminent à l’évocation des épices, comme le piment penja, le tchobi et les noix pebe. Quand on lui demande son plat préféré, sa réponse fuse : « Sans aucun doute le pondu (sombe) ! La version congolaise, avec du poisson et des crevettes séchées ».

Au cours de ses voyages, il a rencontré de nombreux chefs africains de qualité mais aussi beaucoup de propriétaires d’organisation et de restaurants qui se plaignaient de ne pas en trouver. Il décida alors de fonder « Chefs in Africa » une plateforme digitale qui vise à cultiver le talent et la passion culinaire venus d’Afrique. A travers cet espace, il connecte des institutions, des centres de formations et des entreprises avec des chefs professionnels et de jeunes étudiants en art culinaire qui sont à la recherche d’expérience de travail. « Nous offrons ce réseau pour les aider à commencer leur carrière » détaille-t-il. « Dans le meilleur des cas, la visibilité les aidera à trouver un emploi, mais d’autres peuvent avoir besoin de notre soutien pour accéder aux stages, aux bourses d’études ou juste pour des demandes de visa ». Homme de défis, Dieuveil Malonga envisage de créer un espace à Kigali qui serait ouvert, où des gens pourraient venir cuisiner, apprendre, et bien sûr déguster. Il insiste également sur son approche collective : « Je ne vois pas la cuisine comme un art individuel, j’aime créer et travailler avec des gens ». Ou s’arrêtera ce visionnaire africain. « Qui sait, peut-être je pourrais créer des menus pour la classe affaires de Rwandair ? Ce serait un grand bonheur », sourit-il. Son ambition ultime serait d’ouvrir un jour sa propre école d’arts culinaires africains ». J’ai encore beaucoup à apprendre que ce rêve se réalise », tempère-t-il. C’est tout ce qu’on lui souhaite.

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